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Finance | |||||||
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Edwin Lefèvre (Editions Valor)
Il faut bien en convenir, « Mémoires d’un spéculateur » est un livre exceptionnel sur la bourse et la psychologie humaine, qui ravit le lecteur même un siècle plus tard. C’est un « classique » de la littérature financière, qui ne fut traduit en français qu’en 1994, et que tous les investisseurs devraient lire. |
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Mais surtout, il détaille comment Livingstone-Livermore s’est forgé son processus d’intervention sur les marchés financiers, formation chèrement payée car il fera plusieurs fois faillite dans sa carrière, ainsi que les mécanismes psychologiques qui sous-tendent ou au contraire altèrent son jugement, ou qui meuvent la grande masse des investisseurs.
C’est le surnom dont hérita Livingstone-Livermore durant de nombreuses années. Il commence à travailler dès 14 ans chez un agent de change (vers 1891) en Nouvelle Angleterre en tant que commis chargé des cotations (il reporte sur un grand tableau noir les cours débités par la bande du téléscripteur). Comme il est doué pour le calcul mental et jouit d’une bonne mémoire, il apprend à « lire le téléscripteur » (read the tape) et relève assez rapidement que les hausses et baisses de cours sont précédées de signes annonciateurs qu’il apprend à repérer. C’est en utilisant ces techniques qu’il va commencer à s’enrichir en jouant chez les bookmakers à saisir les petites fluctuations des marchés. A cette époque, les bookmakers (à ne pas confondre avec les courtiers qui achètent et vendent des actions pour le compte de leurs clients) étaient des « officines tolérées » où l’on pariait sur les cours de bourse (ils furent définitivement supprimés en 1933), dont les pratiques consistaient principalement à faire croire aux clients qu’ils pouvaient gagner facilement de l’argent tout en les plumant méticuleusement, car ils encaissaient non seulement une commission mais également si possible (et ils faisaient tout pour ça), la marge déposée. Si un individu misait à la hausse sur une action cotant 20 dollars, il payait non la totalité de son achat mais seulement une « commission d’achat » de 1/4 de dollar (d’où un prix d’achat de 20 ¼ $) plus une « marge » de 1 dollar. Il ne commençait à gagner qu’au dessus de 20 dollars ¼, mais perdait tout si le cours descendait en dessous de 19 ¼ dollars, car il n’y avait pas d’appel de marge. Selon les investisseurs, les bookmakers pouvaient varier le montant de la commission et/ou de la marge exigée. En fait, les clients jouaient non contre le marché mais contre le bookmaker, la bande du téléscripteur faisant foi. Si les clients devenaient par trop gagnants, par exemple en cas de hausse, le bookmaker télégraphiait à son courtier de New York de vendre un paquet d’actions de la valeur concernée pour peser sur le cours et le faire descendre d’un seul coup de quelques dollars, histoire de liquider les marges des clients.
Les débuts à Wall Street furent difficiles. Il lui fallut du temps pour comprendre que sa technique, basée sur la lecture du ruban du téléscripteur pour détecter les petites fluctuations du marché, impliquant la multiplicité des opérations et la prise de petits profits pris rapidement, ne fonctionnait plus ici. Il se retrouva plusieurs fois sur la paille, et dut retourner chez les bookmakers se refaire financièrement, bien qu’il fut connu comme le loup et régulièrement chassé. C’est toujours sur la base de la lecture attentive du téléscripteur qu’il construisit sa nouvelle approche, en l’occurrence détecter la tendance du marché dans son ensemble (ce dont il ne se souciait pas auparavant) et ne jamais aller contre, sélectionner des valeurs en phase avec le marché et leur secteur d’activité, respecter le bon timing (entrer et sortir ni trop tôt, ni trop tard), rechercher les lignes de force et de moindre résistance pour définir les continuations ou changements de tendance, ne créer une ligne de titres que progressivement pour vérifier que l’évolution du cours confirme l’analyse, apprendre à sortir quand on peut et non quand on veut, etc… Aujourd’hui, la littérature financière est abondante et nous connaissons tous ces principes devenus fondamentaux. Mais nous disposons de graphes, du carnet d’ordres, d’indicateurs techniques, c’est-à-dire d’outils quasi inconnus à l’époque (les premiers graphiques faisaient leur apparition, mais il ne les utilisait pas). Qui serait capable de nos jours d’intervenir sur les marchés uniquement sur la base du flux continu des cotations ? Bien peu de personnes.
Livingstone-Livermore développa une très grande capacité à s’auto analyser pour découvrir les causes objectives de ses échecs et de ses réussites, et ne pas rejeter ses erreurs sur les autres ou sur le marché. Bien sûr, il voulait gagner de l’argent puisqu’il vivait de ses activités financières, mais il s’attachait à travailler selon les règles qu’il s’était fixé, méthodiquement et intelligemment, en se détachant de l’argent pour ne pas fausser son raisonnement. L’observation, l’expérience, la mémoire et une évidente capacité à manier les chiffres, étaient pour lui les qualités essentielles d’un bon spéculateur, qui par ailleurs, devait toujours réfléchir en termes de probabilité. Il considérait que le spéculateur portait en lui-même ses propres démons responsables de ses pertes, à savoir l’ignorance, la cupidité, la peur et l’espoir.
Ces « Mémoires d’un spéculateur » sont une lecture incontournable pour tous ceux qui interviennent en bourse, qu’ils soient trader ou investisseur, débutant ou expérimenté, pour au moins trois raisons. Enfin, la nature humaine étant immuable, les mécanismes psychologiques finement dépeints relatifs au spéculateur lui-même ou aux comportements moutonniers des actionnaires sont riches d’enseignements pour apprendre à mieux se connaître avant d’affronter les rapports de force inhérents aux marchés financiers, dans lesquels la psychologie humaine tient une place déterminante. La manipulation des esprits n’est jamais loin, d’autant plus aujourd’hui que toutes les sociétés gèrent leur image par le filtre d’une direction de la communication. Pour être exhaustif, il faut préciser qu’il existe aussi une quatrième et ultime raison. C’est un livre vivant, bien écrit, au style incisif, qui se lit comme un roman passionnant, et dont on ne peut se détacher jusqu’à la dernière page. Et que l’on relit avec plaisir.
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